Hosanna : retour bouleversant sur la quête d’identité

Le Théâtre du Nouveau Monde (TNM) présente Hosanna ou la Shéhérazade des pauvres avec une mise en scène de Maxime Robin. Hosanna, qui a passé son existence à chercher son identité, raconte à travers trois périodes de sa vie une soirée qui a mené à « [sa] chute, [sa] déconfiture, [son] indignation ». 

Photo: Yves Renaud

À la suite de son succès au Théâtre du Trident en 2023, la pièce fait son entrée à Montréal. Inspirée par le livre La Shéhérazade des pauvres de Michel Tremblay, elle présente le personnage emblématique d’Hosanna reprendre vie pour aller à la découverte d’une sexualité inexplorée. 

Un rideau qui dévoile un héritage queer

Sous les lumières allumées et l’action des spectateurs qui cherchent leur siège, la pièce commence doucement avec un homme en haut de son escalier en colimaçon côté cours de l’avant-scène, devant le rideau baissé. Les regards rivés sur lui, ce personnage excentrique, vêtu d’un peignoir de satin doré, s’allume une cigarette et se sert un verre de ses mains tremblantes.

Yannick (Sally Sakho), jeune journaliste non-binaire, fait son entrée sur scène devant un rideau baissé. Par le biais de plusieurs personnages de la Main (Boulevard Saint-Laurent), Yannick a réussi à retracer Claude Lemieux (Luc Provost), pour une entrevue destinée au magazine LGBTQ+, Fugues. 

Arrivé à Montréal pendant la frénésie queer des années 60-70, Claude a adopté « un nom pour vivre deux pouces au-dessus du sol », « un nom pour [se] sortir de [son] insignifiance »: Hosanna. 

Depuis 50 ans, il gîte dans son petit appartement en bloquant, avec des rasades de gin, les souvenirs de la soirée où il s’est fait ridiculiser par ses « amis ». Un choc générationnel est creusé, lorsqu’il est confronté à la nouvelle réalité d’identité de genre. « Je suis un iel ou une ielle maintenant… », lance Hosanna. 

Un univers théâtre vibrant

Le rideau se lève et révèle une scène colorée, remplie de plusieurs éléments décoratifs. Le magasin Ogilvy fourni de pièces de vêtements désirées, le bar Hawaiien Lounge, le petit appartement d’Hosanna et de son amoureux, Cuirette (Gabriel Fournier), sont des éléments du décor qui s’entrelacent pour créer différents lieux habités à différents moments. 

Photo: Yves Renaud

Le décor n’est pas le seul élément impressionnant qui habite la scène. Le jeu intense des comédiens touche le public. Valérie Laroche et Jonathan Gagnon s’illustrent tout au long de l’acte. La première comme chanteuse qui ajoute du dynamisme en passant de Diane Dufresne à Elvis, le second dans la peau d’une Sandra sournoise et prodigieuse, un « ami travesti » d’Hosanna.

À certains moments de la pièce, le quatrième mur est brisé. Lorsqu’un spectacle de « travesti » est présenté à la Place des Arts, les personnages des années 70 viennent s’asseoir dans la salle pour y assister avec le public. L’absence de quatrième mur permet la création d’un effet comique, mais également la fondation  d’un lien d’attachement plus fort avec les comédiens et comédiennes.

L’enfant que Claude porte encore

La vulnérabilité de Vincent Roy (Hosanna jeune adulte) sur scène accordé à l’insignifiance maladroite de Cuirette renferme une vérité des couples homosexuels pendant la Révolution tranquille. 

La mise en scène embrasse non pas deux, mais trois dimensions de l’existence de Claude. L’ajout d’un troisième comédien (Sacha Lapointe et Oscar Vaillancourt, en alternance) apporte une fragilité à la pièce où le public est face à la détresse d’un enfant en quête de son identité. L’effet est également accentué par des passerelles qui télécopient l’enfant dans l'adulte à quelques reprises.

« Je pense que j’avais peur de ce qu’il y avait en dessous », a avoué Claude. Sur scène, les époques se frôlent, les blessures s’ouvrent et se referment dans un même souffle. Chaque geste devient une tentative de renaître. 

Photo: Yves Renaud

Le public en sort touché, ébranlé, mais surtout vivant, avec l’envie urgente d’en apprendre davantage sur la vie d’Hosanna. Une pièce qui parle à celles et ceux qui ont déjà cherché leur place sans jamais oser le dire.