À la croisée des chemins entre un cours magistral, une exposition et un film, Beijing Spring nous fait parcourir un pan méconnu et pourtant si riche de l’histoire de l’art en Chine. Présenté actuellement au Festival International du Film sur l’Art (FIFA), ce long-métrage d’Andy Cohen et Gaylen Ross nous tient en haleine, nous éduque et nous émerveille en mêlant images d’archives et témoignages des artistes qui ont élevé leur voix contre la censure à la fin des années 70.
Un combat épique pour la liberté
Beijing Spring, c’est d’abord l’histoire d’une lutte pour la liberté d’expression. Pour nous mettre en contexte, le documentaire revient sur les débuts de la Chine maoïste et s’attarde sur la révolution culturelle orchestrée par Mao Zedong à partir de 1966. Dans une Chine fanatisée, les «gardes rouges» s’en prennent aux institutions du passé (musée, temples…), persécutent les intellectuels et uniformisent la culture.
Le documentaire retrace alors l’évolution du mouvement artistique qui, après cette longue période de censure et de répression, prend naissance à Beijing. Cet élan vers la liberté se manifeste sous différentes formes et s’illustre par l’exposition de nombreuses œuvres dans la capitale chinoise.
À travers le film, différents acteurs de ce mouvement témoignent des faits et du sentiment d’ensemble qu’ils ont éprouvé à l’époque. Ils reviennent notamment sur les affiches et les magazines d’opinion placardés sur le mur de la Démocratie à Beijing ou encore les lectures publiques de poèmes dont ils comparent aujourd’hui l’engouement à celui d’un concert. Une grande partie du film s’intéresse aussi au regroupement d’artistes The Stars, qui risquait la prison à chaque fois qu’il exposait ses œuvres.
Comme une visite au musée
Le film est ponctué de présentations d’œuvres sur lesquelles il est possible de s’attarder si on visionne le documentaire depuis chez soi. À l’instar d’une exposition, les tableaux, sculptures ou photographies sont affichés à l’écran pour quelques secondes, accompagnés de leur titre et du nom de l’artiste. Des dizaines de pièces, d’une variété incroyable, sont ainsi présentées, rendant hommage aux artistes militants de l’époque.
À plusieurs occasions, certaines œuvres maîtresses, dont l’histoire regorge d’anecdotes croustillantes, sont expliquées. Pourquoi ? Comment ? Dans quel contexte ? Quand l’œil du public ne voit que la beauté et la technique derrière l’art, les commentaires des intervenants et intervenantes permettent de comprendre les enjeux qui entourent chaque illustration. On comprend alors pourquoi peindre un corps nu est un acte de rébellion, par quels moyens les artistes se procuraient de l’encre, ou encore comment, lors de leurs séjours en prison, ils dissimulaient leurs dessins entre les pages d’un livre.
Une oeuvre chargée d’émotion
Ce long-métrage, en plus de nous présenter des œuvres d’une beauté exceptionnelle, nous fait vivre ce mélange d’exaltation et de peur que ressentaient les artistes de l’époque face à la répression. Les images d’archives utilisées illustrent parfaitement ce récit passionnant qui semble issu d’une époque qui semble très lointaine, mais qui ne date que d’une cinquantaine d’années.
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