– Promis, je vais rentrer avec le dernier métro. Je fais juste un tour. Je ne resterai pas longtemps.
Arrête. La seule personne que tu réussis à convaincre, c’est toi!
Dis bonjour au FOMO.
Étant moi-même grandement atteint par cet insidieux syndrome, je le connais, cet affreux sentiment. Celui ressenti lorsque t’es assis avec ta zappette illico sur demande devant Julie Snyder et son banquier, seul, un vendredi soir.
Merci à toi, mon bel Instagram, partenaire de divan par excellence, qui se fait un point d’honneur à me montrer à quel point l’entièreté de mon réseau social a une vie nettement plus glamour que la mienne. Comme ils ont l’air branchés avec leurs photos branchées et leurs bars encore plus branchés, tandis que j’ai l’air d’un nul à être, encore une fois, seul dans mon salon.
Mon corps a beau me dire que c’est correct, que j’ai le droit de prendre un break, mais ma tête, elle, ne veut rien savoir.
Un tas de questions des plus existentielles surgissent alors dans ma tête en ce beau vendredi soir d’automne. Pourquoi est-ce qu’ils ne m’ont pas invité? Si je refuse d’y aller, est-ce qu’ils vont me trouver plate? Est-ce que j’assiste à l’annihilation totale de ma propre vie sociale sans même m’en rendre compte?
Sûrement pas.
-Maripier, ouvre la valise!
Le FOMO, ou the fear of missing out, est la peur de manquer un événement qui pourrait donner une occasion d’interagir socialement ou la peur de mal choisir ses activités en fonction de son temps. Il se retrouverait davantage chez les personnes ayant des besoins psychologiques insatisfaits, comme celui d’être aimé et respecté. Et, surprise, il est principalement actif chez les milléniaux. En effet, selon une étude menée aux États-Unis, près d’une personne issue de la génération des milléniaux sur deux a déjà expérimenté le FOMO ou risque de le faire dans le futur. Plutôt normal, lorsqu’on constate de notre tendance à exhiber nos vies sur les réseaux sociaux.
– Claude, il ne vous reste que deux valises à ouvrir!
Le besoin de performer socialement s’installe donc inévitablement. L’envie de sortir cède ultimement sa place à la pression d’être le plus drôle, le plus fin, le plus vu, le plus présent. Et tout cela semble justifié, légitimé, depuis le jour où Facebook a réussi à sublimer la quête des likes à celle du Saint-Graal.
-Cette offre est refusée!
Ce soir, je n’ai plus le goût de mettre mon masque-sourire pour un événement dont, au fond, je me fous éperdument. Non, je ne sortirai pas. Je vais me terrer dans le sous-sol qui me sert de bunker anti-sollicitations-sociales. Je repousse à demain matin le moment fatidique où j’aurai à rouvrir mon 4G et à constater à quel point j’aurais dont dû y aller à cette fameuse soirée. Non, ce soir, je ne sors pas. Après tout, j’ai une date à finir avec Julie.
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