Maɬni : signifiant « vers l’eau » en chinook wawa, langue autochtone parlée dans le Nord-Ouest Pacifique, et prononcé « moth-nee », le mot introduit bien le rapport à l’eau qui caractérise le premier long-métrage documentaire du réalisateur Sky Hopinka. Présenté dans le cadre des RIDM, le film rend hommage aux mythes et à la culture des peuples Chinook, mais aussi à la nature vibrante qui berce les multiples récits portés à l’écran.
Sweetwater Sahme et Jordan Mercier, les deux « personnages » pourtant bien réels, se livrent au réalisateur alors qu’ils contemplent leurs liens avec la mort,la vie et ce qui se passe après tout le reste. Alternant entre anglais et chinook wawa, le récit quasi méditatif est ponctué de narrations racontant les origines du mythe chinook de la mort. Sky Hopinka, lui-même d’origine Ho-Chunk, renoue avec brio avec la touche expérimentale caractéristique de ses courts-métrages à plusieurs reprises pendant le film.
Hopinka réussit à conserver l’intégrité de la nature comme on le voit rarement sur caméra. L’immensité de l’océan, le patchwork de la forêt, la danse des gouttelettes autour de la chute d’eau: il lui suffit de pointer sa caméra vers les arbres, grandioses, ou les vagues, hypnotiques, pour nous immerger dans le film.
Il est difficile de reprocher au produit final son manque de direction claire, alors que ce même aspect lui permet d’envoûter facilement les spectateurs malgré ses longueurs. L’excellente musique d’ambiance et le remarquable travail sonore contribuent aussi à la qualité immersive du documentaire.
Si la pertinence des segments individuels est souvent difficile à cerner sur le moment, c’est parce que les réflexions et fragments de mythes prennent tout leur sens dans leur juxtaposition et leurs parallèles. Le mythe de la mort précède les réflexions de Sweetwater Sahme sur la naissance prochaine de son enfant; la mer calme devient rivière, puis devient chute, avant de redevenir océan dans un concert de vagues et d’écume. Il y a un cercle continu dans l’existence des humains comme dans le voyage de l’eau, semble constater Sky Hopinka.
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