Sin La Habana est le premier long-métrage cubano-québécois de Kaveh Nabatian, qui dépeint Cuba à travers une lentille suave, souple, douce, hardie et colorée. Présenté au 49e Festival du Nouveau Cinéma (FNC) jusqu’au 31 octobre, le film a remporté le Prix de la diffusion Quebecor « pour le rayonnement d’une œuvre marquante de la Compétition ».
Leonardo (Yonah Acosta) vit à Cuba et excelle au ballet. Pourtant, le rôle-titre de la prochaine pièce montée par son académie lui glisse entre les doigts. Sa copine Sara (Evelyn O’Farrill), femme sublime remplie d’ambitions, rêve de partir et de pouvoir exercer son métier d’avocate. Elle le pousse à séduire une touriste canadienne, Nassim (Aki Yaghoubi), qui fait partie de la classe de danse qu’il enseigne. Les amoureux pourront alors quitter leur pays, qui ne semble n’avoir aucun avenir pour eux. Réticent, Leo ne semble cependant pas avoir d’autres choix devant la détermination de son aimée et les grandes écoles de danse de Montréal ont raison de son orgueil.
Nabatian aurait bien pu opter pour un passage de Cuba à Montréal visuellement très radical, les villes ayant des réalités différentes. Pourtant, le même grain de caméra accompagne la trame narrative jusqu’à la fin. Les couleurs étant majoritairement froides, les tons plus chauds viennent empêcher le tout de devenir terne. Cela permet de mettre l’accent sur le bonheur et la quiétude des esprits créatifs et enivrés.
Dans les rues de Cuba, les plans rapprochés nous montrent les visages des danseurs et les virevoltements des tissus de couleur. Les mouvements se fondent dans la musique et les expressions pures qui sont captées ne peuvent être ignorées.
Leo arrive à Montréal pendant l’hiver froid du Québec, où il est allé rejoindre Nassim. Rapidement dépaysé, il se remémore les rituels cubains qui se présentent presque telles des esquisses, appuyant encore davantage l’esprit artistique du film. Ancrant son esprit et lui donnant l’énergie et la force de persévérer, ces passages nous rappellent l’importance de l’expérience individuelle comme moteur de création. Bien que la danse et la musique aillent de paire, le ton taciturne du film est fort et laisse place au grand jeu des acteurs, qui empreint chaque scène d’une solennité poétique. Son apogée est sans aucun doute la deuxième chance d’audition de Leo aux Grands Ballets, une scène qui se révèle majestueuse et puissante. Nous ne pouvons qu’admirer le talent et le dévouement du jeune homme pour sa discipline.Yonah Acosta le porte sans faute, du début à la fin.
La chute étant peut-être un peu prévisible, le cheminement des trois protagonistes n’en est pas moins touchant. L’œuvre de Nabatian est d’une beauté délicate et lyrique, mais contient aussi la fougue sauvage de trois vies qui se rencontrent et s’entremêlent alors qu’elles veulent tracer leur propre chemin.
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