L’histoire revisitée des Viqueens
- Gabrielle Proulx
- 2 févr.
- 2 min de lecture
Le Centre du Théâtre d’Aujourd’hui accueille la pièce Viqueens: saga nordique, une réécriture sous une loupe gynocentrique de l’histoire des Vikings, signée Laurie Léveillé et Laurence Laprise. Une pièce chargée d'histoire qui s’avère un réel défi narratif et dramaturgique.

Mention photo: Valérie Remise
Le corridor menant à la salle est décoré de fiches d’informations sur les Viqueens effacées de l’histoire. Birka la guerrière, figure importante des Vikings longtemps connue comme un personnage masculin malgré des preuves solides du contraire, a inspiré l’écriture de ce récit.
Le son du vent provenant de la salle nous guide jusqu’à nos sièges. La scène est habillée de manière minimaliste avec quelques roches et un petit écran d’aluminium au fond de l’espace de jeu.
Qui sont ces Viqueens?
Les trois actrices entrent en scène en fredonnant des hymnes traditionnels. De là s’ensuit une mise en contexte sous la forme de longs monologues: qui sont-elles, quelle est la prophétie qui les guidera tout au long de la pièce et quelles sont leurs histoires personnelles? Ulfhild, incarnée par Isabeau Blanche, reine des Viqueens, raconte la prophétie de l’élu du futur qui sauvera leur héritage historique. Il est primordial de souligner sa performance marquante. Elle insuffle ces monologues explicatifs d’une justesse teintée d’humour et de folie. Puis Frigg et Svanhilde (Sally Sakho et Élodie Maher), ses fidèles acolytes, expliquent comment elles ont exilé les hommes sur une île grâce à leurs tours de ruse et de force.
Ces longues tirades qui flirtent avec l’absurde sont parsemées de références actuelles : « Lors du Midsommar, le vrai là, pas le film avec Florence Pugh », lance une des comédiennes.
Ce choix d’écriture, en plus du lexique propre aux Viqueens, donne un rythme assez lent à la pièce. Une grande concentration est nécessaire afin d’assimiler tous les détails du développement narratif complexe, ce qui devient épuisant à la longue.
À ce trio de femmes s’ajoute BroPain, interprété par Thomas Derasp-Verge, l’élu selon la prophétie des trois femmes. Pourtant, il n’est qu’un homme de 28 ans convaincu d’être dans un Grandeur Nature où il incarne un personnage de boulanger devin. La surprise l’envahit lorsqu’il réalise qu’il a accidentellement voyagé dans le passé au temps des Viqueens. Thomas Derasp-Verge, avec son historique d’improvisateur, saisit toutes les occasions pour faire rire le public avec son personnage innocent, mais attachant.
Intrigue secondaire
Par moment, un certain dynamisme manque pour maintenir l’attention de l’auditoire. La seconde partie de la pièce gagne en intensité grâce à l’ajout de jeux de lumière plus marqués. Des voix en arrière-plan donnent l’impression qu’un clan de guerrières est présent, accompagné des mouvements synchronisés des trois femmes, un second souffle nécessaire à la pièce.
L’intrigue semble secondaire en comparaison aux présentations de l’histoire des Viqueens. Le dénouement survient de manière soudaine et repose sur des éléments jusqu’alors inconnus du public. Les différentes péripéties semblent alors obsolètes. Ceci affaiblit la résolution dramatique pourtant bien touchante.
La pièce Viqueens : saga nordique offre une vision nouvelle de l’époque des Vikings, peut-être une vision plus proche de la réalité ? Cette pièce pose un regard sur le passé et chamboule les codes du récit épique. Laurie Léveillé et Laurence Laprise naviguent une relecture ludique et engagée qui remet au premier plan celles que l’histoire a choisi d’effacer.
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