Chasse à l’homme, c’est la quête d’un amour qui ne vient jamais, une histoire qui n’est pas encore arrivée, une écrivaine qui ne connaît pas encore son propre dénouement. C’est aussi l’une des cinq œuvres en lice pour le Prix littéraire des collégiens, qui sera attribué le 21 avril prochain.
Après Chanson française en 2014, Sophie Létourneau en est à sa deuxième nomination comme finaliste au Prix littéraire des collégiens, qui récompense les meilleurs livres québécois parus dans l’année précédente. Les cinq livres sélectionnés seront d’ailleurs évalués par des dizaines de jeunes du cégep, qui choisiront le livre qui aura suscité le plus d’intérêt dans leur tranche d’âge. Chasse à l’homme, publié par les Éditions La Peuplade, se désigne dès ses premières lignes comme une autofiction, où l’autrice raconte son histoire à travers les prédictions d’une cartomancienne auxquelles elle a décidé de se fier.
« Cette histoire a commencé au moment où je l’ai suivie. »
Dans son roman en quatre temps, Sophie Létourneau s’adresse à un tu qui semble lui être familier, mais qui lui est encore inconnu. Qui est l’homme promis par la cartomancienne? Dans cette quête à travers le monde, l’écrivaine réalise que les femmes ont toujours cherché l’amour dans le but d’atteindre une ultime félicité – comme quoi l’âme-sœur serait gage de bonheur. Mais est-ce vraiment une finalité? Pour être comblée, une femme doit-elle absolument trouver son prince charmant?
C’est donc teinté d’un féminisme à la fois clair et subtil que Chasse à l’homme apparaît comme une œuvre qui, en plus de l’embrasser, remet en question notre rapport à l’amour. Truffé de références aux femmes qui ont marqué l’histoire, l’autrice met de l’avant toutes les fois où elles ont attendu et espéré un homme.
« Dans cette histoire, je m’identifiais au garçon. Comme les hommes, je voulais que ce soit mon désir qui l’emporte. Je ne voulais pas être la fille, je ne voulais pas t’attendre : je voulais te gagner. »
Cette résignation s’accompagne d’une écriture pleine d’espoir, qui équilibre à la fois le passé de l’auteure, son récit, écrit au présent, et l’avenir promis par la voyante. Létourneau jongle entre tous ces souvenirs avec justesse, si bien qu’il est impossible pour les lecteurs de déterminer si Chasse à l’homme est une œuvre qui a vraiment été écrite pendant les événements qui la constituent.
À cet effet, les fragments qui composent les différentes parties du roman représentent l’une des particularités stylistiques de l’œuvre. Ceux-ci ont d’ailleurs réussi à mettre en valeur cette contradiction entre le passé et l’avenir, entre la réalité et l’imaginaire. Pour la plupart constitués de quelques phrases, ces fragments de récit entrecoupent la lecture, mais réussissent à la garder captivante à toutes les pages. Chasse à l’homme traverse le temps, l’espace et l’imaginaire, mais Sophie Létourneau a su ancrer son œuvre dans la réalité – du moins, dans la sienne. Mais, comme elle le soulève dans son récit : « À qui appartient une histoire vraie? » A-t-elle écrit sa destinée ou l’a-t-elle provoquée en écrivant Chasse à l’homme? Chose certaine, l’écriture a été le médium par lequel s’est exprimé son désir de trouver l’homme de sa vie, que son destin ait déjà été écrit ou non.
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