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ANNA : des trains d’idées qui s’entrechoquent 

Le mois d’octobre au Théâtre du Nouveau Monde a été marqué par la présentation d’ANNA - ces trains qui foncent sur moi. Entre patriarcat, pouvoir politique et privilèges de classes sociales, cette pièce signée Steve Gagnon soulève de nombreux enjeux au cœur de l’actualité, peut-être même un peu trop.


Crédit photo: Christophe Pean
Crédit photo: Christophe Pean

La pièce s’ouvre sur un monologue d’Anna, jouée avec grâce et éloquence par Véronique Côté. Seule, face au public, elle s’adresse à Nina, sa fille, à qui elle présente des excuses répétées, comme si elle lui écrivait une lettre. 


Anna devra, tout comme l'héroïne d’Anna Karénine, roman emblématique de Tolstoï qui a inspiré cette pièce, choisir entre passion amoureuse et sacrifice de sa liberté pour protéger les apparences. 


« On aurait été heureux tous les trois [avec Nina]. C’est toi qui as choisi l’obéissance », reproche Alexis (David Boutin), l’ancienne flamme d’Anna et le père biologique de Nina, à son amante. Par ces mots, il souligne combien celle-ci a dû se plier à une existence docile et dépossédée pour satisfaire les attentes de son milieu.


Le frère d’Anna est Stéphane, le premier ministre sortant (Marc Schapira) et son mari est Yvon, le prochain dirigeant à la tête du même parti (Frédéric Cherboeuf). Stéphane et sa femme, Daria (Violette Chauveau), accueillent dans leur vaste domaine forestier leur groupe d’amis pour un week-end. La bande, formée au fil des ans par leur rattachement commun au même parti politique, se réunit afin de saluer la fin de session parlementaire. 


Premier acte : éloges amicaux et piques acérés 


Pour la plupart des scènes, les personnages sont rassemblés autour d’une table, mêlant discours philosophiques à blagues légères et osées. Ils passent d’éloges amicaux à piques acérées, faisant progressivement monter la tension entre eux. 


Malgré un texte dense, l’ensemble des comédiens livrent leurs répliques avec fluidité et complicité. Ils naviguent au travers de déplacements complexes, remplis de petits détails : accolades, bousculades, danses et sous-conversations pendant qu’un certain personnage s’adresse au public. Cette chorégraphie rend leurs échanges plus naturels.  


Que ce soit l’environnement, la politique, en passant par les classes sociales, la définition du couple et la condition féminine, les sujets brûlants s’enchaînent, le tout arrosé d’un peu trop de vin. 


La multiplicité des sujets ajoute du dynamisme aux nombreuses scènes. Or, la plupart d’entre eux restent peu approfondis. Certains enjeux relationnels, comme celui de deux amis qui se sont éloignés parce l’un d’eux est en couple, apparaissent sans vraiment contribuer au fil narratif principal.


La ligne dramatique principale, soit Anna et ses conflits intérieurs, notamment sa relation avec Alexis, se retrouvent donc en second plan pendant une grande partie de la pièce. 


Deuxième acte : les masques tombent 


L’ambiance festive bascule avec l’arrivée d’Alexis. Cet événement marque ainsi le début du second acte, qui laisse majoritairement place à des scènes intimes, souvent en duo. Tout comme Anna, les autres personnages voient leurs blessures et leurs secrets remonter à la surface. Le jeu des acteurs devient alors plus lent, ce qui permet au public d’absorber pleinement l’émotion. 


L’humour reste tout de même omniprésent, même lors des scènes au ton lourd. Il est surtout porté par Violette Chauveau, captivante dans le rôle de Daria, une femme à la personnalité désinvolte, coquette et superficielle. Ce contraste rend la pièce plus digeste et garde l’auditoire engagé.


Le spectacle s’étend sur trois heures et demie, avec entracte. Dans l’ensemble, les spectateurs et spectatrices doivent faire preuve d’une grande attention pour démêler les liens complexes unissant les quatorze personnages de l’histoire. Si l’intrigue s’égare parfois, le jeu des comédiens, lui, reste juste.


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